Témoignage d’Emmanuelle, photographe bénévole pour Souvenange

Je voulais vous raconter ma rencontre avec un petit ange…

Je m’appelle Emmanuelle, j’ai 28 ans et je suis bénévole photographe pour l’association SOUVENANGE.

Mon histoire commence fin novembre. Hélène, la présidente de l’association, me contacte pour une demande d’intervention dans une maternité à la demande des parents, pour début décembre. Cette maternité n’a pas signé de convention avec Souvenange, il n’y a pas de photographe bénévole dans le secteur. Hélène me demande si je peux intervenir dans cette maternité le lendemain de la naissance du petit garçon.
Hélène me laisse le choix d’accepter ou non…
Mais comment refuser la demande de cette maman, de ces parents… Et puis je me suis engagée pour ça, apporter mon aide aux parents. Je dois le faire.
Avant de donner ma réponse, j’organise ma vie de famille, pour cette journée particulière, afin de faire garder ma fille.

Je contacte Hélène, ma réponse est : OUI.

Il fallait maintenant que je contacte la future maman par téléphone pour que l’on prépare au mieux mon intervention. J’avais un peu peur de lui parler, peur de dire un mot plus fort que l’autre, un mot mal placé. Le contact s’est fait naturellement, nous avons pris le temps d’échanger sur l’association, du lieu des photos. Elle m’a demandé ce qu’elle pouvait rapporter pour ce jour-là et si elle pouvait être présente avec le papa.
La semaine a été chargée en émotion. Entre attente et inquiétude. Nous nous sommes contactées 2 ou 3 fois, et je savais que j’allais rencontrer un tout petit garçon. Un petit garçon qui naîtra sans vie. Á chaque fois que je raccrochais le téléphone, les larmes coulaient sur mes joues. Je n’osais imaginer leur chagrin…

Le jeudi 7 décembre à 19h45, je reçois un message vocal de la sage-femme : Petit A. est né… Une date que je n’oublierai pas.

Le jour J est enfin arrivé, le vendredi 8 décembre. Ma fille et mon mari quittent la maison, je les embrasse. Je contrôle une dernière fois mon matériel, pour ne rien oublier. Il est 8h45 je prends la route pour la maternité. Je préviens le papa. Je suis sereine. Le jour se lève tout doucement en cette matinée de décembre. Le soleil inonde petit à petit les champs, les routes. Les couleurs sont magnifiques. Il fait frais. Sur la route je regarde à nouveau si tout mon matériel est bien dans mon sac. Je sais l’importance de ces photos et je n’ai pas le droit à une seconde chance. Mon GPS me guide, j’essaie de me concentrer sur la route.

Après 1h20 de trajet, il est 10h10, je viens de me garer devant la maternité. J’envoie un message au papa pour le prévenir de mon arrivée et j’appelle la sage-femme. Elle vient très rapidement à ma rencontre. Nous échangeons sur l’association en marchant dans les couloirs. Elle me présente une petite salle avec une fenêtre et un lit, c’est parfait. Le temps de sortir mes affaires et de préparer le lieu, nous discutons tranquillement. La sage-femme est bienveillante et est intéressée par ma démarche et celle de Souvenange. Je suis contente qu’elle reste un peu avec moi pour parler, car mon stress commence à monter. Je sais que ma rencontre avec ce petit ange est proche.

Je lui demande si je peux voir petit A. avant la venue des parents. Je ne voulais pas avoir un visage peiné ou une réaction particulière devant eux. La sage-femme arrive dans la pièce, petit A. est enveloppé dans un linge blanc. Elle le pose délicatement sur le lit. Nous entrouvrons le tissu et je découvre son petit visage. Il est dans un joli nid d’ange en tricot blanc avec un bonnet bleu ciel. Il est beau. Si petit mais déjà si parfait.

Je n’ai pas osé prendre ce petit bonhomme pour le déplacer. Mes mains ont commencé à trembler et j’ai eu peur d’abîmer sa peau si fragile. C’est la sage-femme qui l’a déposé sur le tissu que j’avais préparé.

Je le regarde. Je l’observe. Je l’admire.

Je commence tranquillement les photos. J’ai toujours en tête l’importance qu’auront ces images pour sa maman et son papa, mais aussi pour toute la famille. Je ne veux rien oublier. Je photographie petit A., dans son ensemble puis je réalise des photos de détails, les petites mains, les petits pieds, son doux visage.

J’entends frapper à la porte, les parents de petit A. sont arrivés. Nous nous sommes eus au téléphone ces derniers jours, le contact se fait très rapidement. Nous regardons ensemble les accessoires que sa maman a pu apporter, dont le doudou de son grand frère. Je continue la prise de vue et nous en profitons pour faire quelques photos de famille.
C’est très émouvant. Je ressens et vois toute leur tristesse, mais j’essaie de ne rien faire paraître. Je suis concentrée sur ma prise de photo et mon appareil me sert de filtre.

Ma mission se termine à la maternité, je repose délicatement ce petit bout dans son linge blanc. Je lui dis au revoir secrètement dans ma tête. C’est la dernière fois que ses parents le verront. Je raccompagne la maman du petit A. et son papa, dans leur chambre. Ils souhaitent me parler et me poser quelques questions sur mon adhésion en tant que bénévole. Nous discutons un peu.

Il est 12h00, je crois, je ne sais plus exactement. Je marche jusqu’à ma voiture, je me sens bien, forte pour le moment. Je monte à fond le son de la radio. Je chante. J’ai l’impression que ça me fait du bien, peut-être pour décharger les émotions. Et puis en fait, non, je ne suis pas si forte que ça… les larmes coulent. Je repense à ce tout petit bébé, né sans vie.

Merci d’avoir lu mon témoignage en tant que photographe bénévole pour l’association SOUVENANGE. Nous avons besoin de photographe et de dons pour financer l’accompagnement des parents.

Emmanuelle